1. La Prière
  2. L’invocation
  3. Le Coran
  4. L’Imam al-Mahdî(qa)
  5. Connaître Dieu
  6. La Voie de l’Éloquence
  7. Spiritualité des Infaillibles(p)
  8. L’Au-delà
  9. Méditer sur l’Actualité
  10. Le Bon Geste
  11. Des états spirituels
  12. La Bonne Action
  13. Exemples des grands savants
  14. Les Lieux Saints
  15. Notre Santé morale
  16. Notre Santé physique
  17. Notre Nourriture
  18. Expces Spirituelles des autres
  19. Le Courrier du lecteur
  20. Le Livre du Mois
  21. La Femme dans l'Islam
  22. Entretiens
  23. Éditorial
  24. Divers
  25. Éduquer nos enfants
2018-01-14 | Readers 2086 | Share with your Twitter followers Share on Facebook | PDF

Nusrat Amin, « mujtahida » et gnostique


Nusrat Amîn« mujtahidat » et gnostique

A l’occasion du jour anniversaire de la naissance de sayyida Fâtima az-Zahrâ’(p), décrété ‘Jour mondial de la Femme’ par l’imam Khomeynî(qs), la revue Lumières Spirituelles publie deux pages spécifiques concernant la femme.  Cette fois-ci, il s’agit de faire la connaissance de sayyida Nasrat Amîn, une femme iranienne extraordinaire du XXe siècle, qui a atteint le rang de l’ijtihâd (sans doute la première de notre temps) et de la Proximité de Dieu.

     Nusrat Amîn est née à la fin du XIXe s.(1), dans une riche famille traditionnelle de commerçants d’Ispahan, croyante, pratiquante et pieuse. Son père était le petit-fils du savant sayyed Ma‘sum Husseini Khatunabadi. Sa mère était la fille de sayyed Mahdi al-Jinab. A l’âge de 13 ou 15 ans, elle épousa son cousin, également grand commerçant religieux d’Ispahan, « Mu‘în at-Tujjâr », avec qui elle eut huit enfants dont un seul survécut.

Elle vécut près d’un siècle en Iran durant une période riche en bouleversements(2)et connut la Révolution Isla­mique menée par l’Imam al-Khomeynî(qs)où elle joua un rôle déterminant à travers sa lutte pour l’éducation de la femme selon les préceptes de l’Islam et la sauvegarde du patrimoine religieux, même si, selon l’apparence, il n’y a pas eu de contacts directs entre eux(3). Elle mourut la première nuit du mois de Ramadan 1403H à Ispahan (soit le 13 juin 1983) où elle fut enter­rée. Un sanctuaire lui a été érigé. Selon sa date nais­sance, elle aurait vécu entre 88-97 ans.

Ses études

A une époque où la majorité des femmes iraniennes étaient analpha­bètes et où il y avait peu de femmes instruites, elle eut le privilège de commencer l’apprentissage de la langue persane et de la lecture du noble Coran, dès l’âge de 4-5 ans.

A 11 ans, elle se mit à étudier la langue arabe et à lire des livres en langue arabe en plus de ceux en persan. Son mariage et l’éducation de ses enfants ne l’empêchèrent pas de continuer sa lecture des livres islamiques et l’apprentissage de la religion, ni non plus d’ailleurs, les tentatives du pouvoir de Ridâ Shah (1925-1941) d’imposer la culture occidentale à la société iranienne pourtant musulmane.

A 20 ans, elle commença à approfondir ses études islamiques au niveau du Fiqh et des sciences ration­nelles (logique, croyances, philosophie) et sa connaissance de la langue arabe (syntaxe, morphologie..) auprès de savants comme Abou-l-Qâsem Zafari’i et ‘Alî Asghar Sharîf.

A 32 ans, elle continua ses études en Droit (Fiqh), Usûl al-fiqh, Sagesse (Hikmah) auprès de grands savants comme sayyed ‘Alî Najaf Abadi, sheikh Mohammed Ridâ al-Asfahânî (Abû Majd), sayyed Mohammed Najaf Ababî, qui venaient chez elle lui enseigner derrière un rideau (à cette époque, il n’y avait pas de hawzah pour les femmes). Rien ne lui faisait aban­donner ses études, ni la maladie, ni la perte de ses enfants. Il est dit qu’elle commença à avoir des révélations mystiques dès l’âge de 30 ans.

A 42 ans (~1354H/1935), après 23 ans d’études assidues des sciences traditionnelles et intellectuelles, elle atteignit le degré de l’Ijtihâd (c’est-à-dire celui d’avoir la capacité de déduire des règles secondaires).

Elle reçut les premières permis­sions ou licences (ijâzat) de l’Ijti­hâd et de transmission de propos rapportés, de grands savants comme sayyed Abû-l-Hassan al-Asfahânî, sh. Mohammed Kâzhem Shirâzî, Abd al-Karîm Hâ’irî Yazdî (qui fon­da les hawzahs de Qom). C’était la première fois que de telles licences (ijâzât) étaient attribuées à une femme. Puis elle en reçut d’autres de sh. Ibrahim Hussaynî Shîrâzî Istah­banâtî, sh. Mohammed Ridâ al-As­fahânî (Abû Majd) et s. Shahab ad- Din Mar’ashi Najafî.

Ses livres

Elle publia de nombreux ouvrages, dont trois en langue arabe, de façon anonyme (signés « Banû îrâniyyah », une femme iranienne). Même son mari l’ignorait.

1-Al-‘Arba‘în al-Hâshimiyyah écrit en arabe alors qu’elle avait la qua-rantaine. (Sa rédaction se termina le 9 moharram 1355H). De l’aveu de son professeur, s.‘Alî Najaf Abadî, ce qui est écrit dans ce livre vient des illuminations de ses pensées.

2-Tariq as-sa‘âdat (Rûsh-i-Khushbakhtî wa tawsiyyat bih Khâharân i-Imamo) écrit en persan peu de temps après, à l’adresse des femmes et qui consiste en conseils aux soeurs croyantes et en indications de la voie de la félicité.

3-Sîr wa sulûk dar Ravish Awliyya-i Allâh écrit en persan à l’âge de 51 ans.

4-Ma‘âd ya Akharim Sayri Bashar, en persan, livre de dogme à propos de la Résurrection avec    cependant une dimension morale.

5-Une traduction et une adaptation en persan du livre d’Ibn Miskaweh « Tahdhîb al-Akhlâq wa Tat’hîr al- A‘râq », terminées en Rajab 1368H.

6-An-Nafahât ar-Rahmâniyyah fî-l-wâridât al-qalbiyyah écrit en arabe et imprimé en 1369H. Livre ‘gnostique’ (‘irfânî).

7-Makhzân al-la’alî dar fazhilati-mawlâ al-mawlâ hazrat i-Alî Ibn Abî Tâlib en persan qui parle des vertus du Prince des croyants(p).

8-Makhzân al-‘irfân fî tafsîr al-Qurân en persan. Une interprétation du noble Coran qui comprend 15 volumes dont le premier fut rédigé alors qu’elle avait plus de 61 ans et le dernier 80 ans.

9-Jâmi‘ ash-Shatât en arabe qu’elle écrivit alors qu’elle avait 71 ans. Il rassemble les réponses à des questions de jurisprudence qu’on lui avait posées.

Ses livres, auxquels il faut ajou­ter ses annotations en marge des livres tels « Les quatre voyages » de Molla Sadra, « Farâ’id al-Usûl » et « Manâzil as-sâlikîna » de sh. Ansarî, révèlent un haut niveau spirituel et gnostique.

Ses activités

Ni ses études ni sa position sociale ne l’empêchèrent de prendre position contre le pouvoir iranien (pahlavi) quand il voulut imposer l’interdiction du port du voile : elle manifesta secrètement et officiellement son opposition, refusant de participer aux cérémonies que le pouvoir organisait pour les notables de la ville auxquelles sa famille était invitée, rédigeant des articles dans les journaux et les revues sur la défense des valeurs de l’Islam et notamment du port du voile. Elle quitta même la ville d’Ispahan et resta pendant 14 mois à Qom, en signe de protestation contre ces mesures anti-islamiques.

A partir de la quarantaine, elle commença à tenir des réunions hebdomadaires pour les femmes dans sa maison. Elle passa la moitié de sa vie à éduquer les étudiantes et à leur enseigner les sciences religieuses. Sa maison à Ispahan devint une sorte de cercle (ou club) pour les femmes savantes (de différents niveaux de culture) venant de différentes villes, pour apprendre de ce que Dieu lui donnait en savoir et en connaissance et profiter de ses conseils sur des questions religieuses et autres.

Elle créa des écoles et des fondations pour la juste éducation islamique des jeunes filles (dont la plus connue est « Maktab Fâtimah » (1965)) où ont été formées de nombreuses femmes qui, à leur tour, assurèrent l’enseignement scientifique et religieux aux femmes, à son époque et après sa mort, préparant ainsi un terrain favorable à la révolution islamique de l’imam al-Khomeynî(qs).

Ses particularités :

®Sa grande humilité, sa patience (notamment face aux épreuves), son abnégation malgré son haut niveau scientifique et sa position sociale, sa haute morale, son amour pour le savoir et sa soif de Dieu qui la poussait à rechercher la perfection morale et spirituelle et la proximité de Dieu.

®Ses préoccupations : la morale, l’éducation (d’elle-même (la lutte de/contre l’âme), de ses enfants et petits-enfants, des femmes en général), le cheminement vers

®Sa méthode (associant la raison, le Texte (le Coran, les Hadiths) et la Bonté subtile de Dieu) :

-la raison permet de faire découvrir la Vérité qui doit être recherchée et amène à la certitude de l’Existence de Dieu mais pas à Sa connaissance ;

-le Texte, considéré comme un Signe (ayat) de Dieu, est quelque chose qui indique la Vérité, donne la guidance qui amène la soumission à Dieu et qui fait naître la Lumière de la connaissance ;

-Celui qui fait connaître Dieu, c’est Dieu (qu’Il soit Glorifié) Lui-même (allusion à l’esprit de l’Effusion divine).

Dans ses livres, elle commence par donner l’explication des mots, de façon linguistique avec les sources, puis cite le noble Coran et les propos des Infaillibles(p), puis les avis de grands savants (même s’ils semblent contradictoires) et enfin elle donne son avis.

Sa démarche révèle une double ou une triple préoccupation : celle de se donner les moyens d’arriver à la Vérité (par le suivi des Signes (indications-ayat) divins) tout en laissant la porte ouverte au Souffle ou à la Lumière de Dieu qu’Il envoie dans le cœur de qui Il veut.

L’Imam as-Sâdeq(p) a dit : « Le savoir n’est pas une accumulation de savoirs acquis mais est une lumière jetée dans le cœur de celui que Dieu veut diriger. Aussi si tu veux la science, demande d’abord, à l’intérieur de toi-même, l’essence de l’adoration, puis demande à Dieu le savoir par son utilisation et qu’Il te fasse comprendre. Alors, Il te fera comprendre. »

Et enfin celle de vouloir laisser la porte ouverte aux autres qui aimeraient suivre ces possibilités de réflexion et découvrir la Vérité par la Voie que Dieu leur aurait choisie.

(1)Sa date de naissance n’est pas précise (entre 1886 et 1897 (1308H – 1312H)).

(2)L’Iran fut sous la domination d’une tribu turkmène les Kadjars de 1794 à 1925. La décadence de leur pouvoir favorisa l’occupation russe au nord et britannique à l’est (qui prit le contrôle du Golfe persique) et l’apparition d’une révolution nationaliste en 1906 qui réussit à imposer une constitution. La période d’instabilité qui suivit, aboutit à la dictature des Pahlavi en 1925 qui s’efforça d’imposer la culture occidentale dans le pays. La découverte du pétrole favorisa l’apparition du Front National de Mossadegh qui nationalisa le pétrole en mars 1951. Mais en août 1953, un coup d’Etat fomenté par la CIA ramena le shah au pouvoir jusqu’à la révolution islamique de l’imam al-Khomeynî(qs).

(3)Selon le témoignage d’une de ses élèves, du fait de son grand âge, elle ne put se rendre à l’aéroport accueillir l’imam al-Khomeynî(qs). Suite aux cours de l’imam sur la Fatiha transmis par la télévision, elle se mit à lire ses livres avec enthousiasme disant que c’était grâce à ses connaissances sublimes qu’il(qs) avait pu faire ce qu’il a fait. Elle demandait de ses nouvelles et lui souhaitait la santé et la réussite. Et l’imam Khomeynî(qs) de même.

www.lumieres-spirituelles.net N°89 - Jumâdî' I et II 1439 - Février-Mars 2018


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